Avant d’en regarder à nouveau les images…

Avant d’en regarder à nouveau les images , les traces laissées dans ma mémoire par le travail, les évocations créés.

( Etais-je la mère, étais-je l’enfant, il y a de la lumière, c’ est l’été, l’époque où les peaux sont à l’ air, l’époque où les jeux écorchent les genoux, les chevilles, les poignets. Une compresse, une bande de gaze blanche enroulée doucement autour d’une plaie, quelques gouttes de sang, permettant à l’un( e) d’avoir le bonheur du soin et de la consolation, à l’autre de sentir le regard- une attention toute particulière du geste, une lenteur-une petite apnée parce que ça fait du mal- souffler dessus une complicité dans ce rituel du pansement léger, blanc, beau.)

Il aurait fallu que les douleurs se prêtent toutes à cette grâce.

Savoir cet impossible et simultanément que seule la légérté, dans son infinie compléxité, sauve.

( Le renflement du tissu bordant un berceau sur une tête d’enfant, le renflement d’un pull sur un sein, le renflement d’un pantalon sur un sexe, la promesse vivantes, voluptueuses, convenues. Envie de toucher, de sentir sous la main le chaud de la peau en dessous, d’en entendre les murmures. Une joie, un rire.

Le poids d’une promesse dans son essence d’emblée menacée, cette tension est son précieux extrême.

(Nager en eau profonde et sombre, noire, avoir le vertige, la nausée, avoir peur, la bouche sèche, transpirer, se perdre dans une torsion perverse d’angoisse blanche, accueillir des monstres. En parallèle avec l’abandon au sommeil, une plongée dans le silence où s’élabore et respire la pensée.

Ne pas s’attarder sur l’incompréhension, ne surtout pas la retenir mais la laisser flotter, la laisser prendre sa place de mystère, en passant.

( Une salle de danse, il y a un quart de siècle- la durée qui frôle, qui caresse-et une remarque d’un professeur sur la façon de connaître l’espace, de l’envisager pour pouvoir s’y inscrire: grand, généreux. Les multiples souvenirs tissés pour accompagner l’avenir.)

Concevoir et donner à voir un espace toujours immense, même infime, comme l’espace d’une vie, les opacités au même titre

Que les transparences, risquer l’équilibre sur la frontière.

Cathrine Inger Winsnes

2005