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2010
Espace d’ Art Contemporain, La Rochelle

Un cheminement sur trois espaces différents, une cellule en tarlatanne qui enferme les fils de la mémoire, l’autre au sol en feutre ciselé s’etale au sol laissant à nos pas le rythme de nos palpitations, pour finir au sol des jupes tombées et des suspentions qui se confrontent vers un danger possible. 

La maison-souvenir, l’élan vital, l’atelier

Dans la première pièce, nos souvenirs sont comme ils sont toujours, présentés dans l’état incertain et flou dans lequel ils nous reviennent : ouatés et flottants, blancs, indistincts. Ces formes nous rappellent bien quelque chose, mais ça ne se présente pas comme on pensait : la grande structure suspendue est une maison dans le genre maison de famille, mais sans les fondations et sans entrée, sans toit, ce genre de maison fantomatique suspendue dans nos rêves. Tout est à distance, lointain, on n’y voit personne ; on devine quelques outils ; c’est ouvert à tous les vents. Et puisqu’il n’y a rien d’autre dans la pièce, il faut comprendre que tout part de là, de cet atelier de couture, une fabrique où tout évoque le tissage : bobines, fil, navettes.

Mais on comprend aussi que les objets du passé nous parviennent emballés et empaquetés, finalement déréalisés, c’est à dire blancs. Martine n’écrit pas son enfance, n’en fait pas le récit anecdotique et rapiécé : pas d’histoire (pas de vieux chiffons, d’accrocs ni de ravaudage qui tiendraient lieu d’anecdote ) : l’usine à souvenirs est uniforme et silencieuse, c’est comme un monolithe sourd et blanc, peut-être menaçant.

Dans la pièce centrale                           poum pow pow                        ça bat ça bat ça pulse ça irrigue                         c’est une affaire de sang                        de réseau sanguin                                 le rythme a changé                   poum pow powpoum                           pow       pow pow                    rien d’autre                                     c’est vital                     fluide                           marcher sur ce tapis vivant, c’est se laisser conduire d’une pièce à l’autre, rien à faire, on a plus de prise, les souvenirs de tout à l’heure sont pulsés, transformés, devenus sanguins, rendus vivants                                             ça pulse ça ne dit toujours rien rien d’articulé pow                               poum pow pow             jusqu’à la troisième pièce

où l’artiste est au travail. C’est l’atelier de Martine, qui sculpte, qui raconte, qui façonne. Martine est à l’ouvrage ; elle a repris le fil de son histoire.

Claude Meunier 2010